22 février 2022
Figure de Maître – Me Suzanne Taffot
Les carrières parallèles de Me Suzanne Taffot
Par Pierre-Luc Beauchesne, avocat
Me Suzanne Taffot est née en Espagne, a grandi au Cameroun, a fait des études en France et a été juriste d’entreprise dans une grande société française avant de s’établir au Québec. Membre du Barreau depuis 2014, elle pratique aujourd’hui en droit de l’immigration et a même fondé son propre cabinet. Mais, ce n’est pas tout. Me Taffot est aussi une chanteuse lyrique que la critique considère comme une « voix à suivre ».
Un parcours académique et professionnel inspirant
On peut dire sans hésitation que le parcours académique et professionnel de Me Taffot n’est pas banal. En 2006, elle termine un baccalauréat axé sur le droit des affaires à Dschang, au Cameroun, avant de poursuivre des études en France où elle obtient deux maîtrises : une en droit des affaires comparé et l’autre en droit approfondi de l’entreprise. Elle travaille ensuite comme conseillère juridique pour Lafuma, une entreprise de fabrication d’équipement de sport.
À son arrivée au Québec en novembre 2010, elle retourne aux études à la Faculté de l’éducation permanente de l’Université de Montréal afin de compléter certains cours et, ainsi, pouvoir exercer le droit. Après l’École du Barreau, elle effectue son stage au sein du cabinet Waïce Ferdoussi où elle pratique en droit de l’immigration jusqu’en 2016, avant de se joindre à une société nominale : « J’ai décidé de me lancer à mon compte pour concilier la pratique du droit avec ma passion pour le chant, car je commençais à avoir de petits contrats qui m’amenaient à voyager. À ce moment-là, j’avais extrêmement peur de dire que j’étais avocate et chanteuse d’opéra. Je craignais qu’on ne me prenne pas au sérieux, autant dans le milieu juridique que dans le milieu artistique. »
En 2019, Me Taffot fonde Heritt Avocats, un cabinet qui réunit l’expertise d’associées et d’avocates afrodescendantes ou sensibles à la question de la représentativité dans le monde juridique. La naissance de son cabinet coïncide avec celle de son deuxième enfant, mais aussi avec la mort médiatisée de George Floyd : « Je me suis alors dit qu’il fallait que je montre quelque chose à mon fils, que je laisse quelque chose à mes enfants. J’ai fondé mon propre cabinet pour donner aux jeunes issus de la diversité des modèles pour qu’ils soient capables de se projeter et de rêver. »
Me Taffot souhaite ardemment que les avocats montréalais continuent d’être sensibles à la représentativité et à l’équité afin que tous aient leur chance. Pour elle, l’équité ne doit pas être perçue comme un privilège qu’on accorde aux personnes issues des minorités, mais plutôt comme le moyen de réparer les préjudices et les injustices provenant d’un système.
Le chant lyrique : une vocation
La vocation musicale de Me Taffot est tardive. À 20 ans, elle commence à chanter au sein d’une chorale universitaire au Cameroun. Lors de ses études en France, elle suit des cours de chant par plaisir afin d’apprendre davantage la technique. Au Québec, après avoir été convaincue par son professeur, elle tente sa chance à la Faculté de musique de l’Université de Montréal. Elle passe une audition et est acceptée au programme de baccalauréat : « Pour moi, c’est un exemple concret d’équité dans les arts. Les membres du jury ont compris que mon parcours n’était pas traditionnel, que je ne répondais pas aux standards, mais ils m’ont donné ma chance ». En 2014, elle complète un diplôme de premier cycle en musique, le tout pendant qu’elle poursuit ses études en droit à l’Université de Montréal et à l’École du Barreau. Elle obtient par la suite une maîtrise en chant-opéra en 2017.
Cette soprano est reconnue pour son timbre unique et riche, de même que pour sa présence sur scène et l’authenticité de ses interprétations. Lauréate de plusieurs concours internationaux, elle fait ses débuts en octobre 2021 comme soliste à la Maison Symphonique de Montréal, sous la direction de Maestro Yannick Nézet-Séguin, avec l’Orchestre Métropolitain de Montréal dans le Requiem de Fauré et le Chariot Jubilee de Nataniel Det. Elle a tout récemment complété l’enregistrement d’un premier album qui sera consacré aux airs et aux mélodies de compositeurs noirs ou sensibles à la question de la diversité dans les arts. Ce dernier sera lancé en février 2022.
Cet hiver, elle participera aussi à l’enregistrement de l’opéra La Flambeau avec l’Orchestre Classique de Montréal, dirigé par Maestro Boris Brott, en plus d’interpréter le rôle de Micaela dans l’opéra Carmen de Bizet. Cet été, on pourra l’entendre dans le Requiem de Brahms, sous la direction de Yannick Nézet-Seguin, ainsi que lors de la première mondiale de l’opéra Yourcenar – Une île de passions, coproduit par le Festival d’opéra de Québec et l’Opéra de Montréal, et ce, dans le rôle de « la chanteuse d’Opéra ».
Me Taffot concilie deux carrières de front et trouve son équilibre entre sa passion pour le chant et son amour pour le droit. Mais, avant tout, elle désire laisser son empreinte et marquer les générations futures.
Pour écouter la voix exceptionnelle de Me Taffot, rendez-vous sur son site Internet en cliquant ici. Elle vous invite également à découvrir le Chœur du Barreau du Grand Montréal (anciennement le Chœur du Barreau de Laval), dont vous pouvez suivre les activités en consultant leur page Facebook.