Rentrée judiciaire 2022
Rentrée judiciaire 2022 : Bâtissons l’Avenir
Par Pierre-Luc Beauchesne
Le 8 septembre dernier, les avocats de la section de Montréal ont enfin eu la chance de se retrouver en personne pour participer aux activités de la Rentrée judiciaire. Tout d’abord, l’Ouverture des tribunaux a eu lieu au Palais de justice de Montréal en matinée. Les ministres de la Justice et les juges en chef ont pu partager leurs réflexions et leurs projets à l’aube de la nouvelle année judiciaire.
Par la suite, en fin de journée, la Cérémonie de la Rentrée, animée par le toujours spirituel Me Joey Hanna, s’est déroulée au Centre Mont-Royal. La Médaille du Barreau de Montréal a notamment été remise au très honorable Richard Wagner pour sa contribution exceptionnelle à la cause de la justice. De plus, comme le veut la tradition, un hommage a été rendu aux avocats célébrant leur 50e ou 60e anniversaire d’admission au Barreau.
Pour ceux qui n’ont pas eu la chance d’assister à la Rentrée, voici un bref résumé des allocutions qui ont été prononcées :
Ouverture des tribunaux
L’honorable Simon Jolin-Barrette : le ministre de la Justice du Québec a tout d’abord souligné l’important travail législatif effectué au cours des derniers mois, dont l’adoption de la Loi visant à améliorer l’accès à la justice en bonifiant l’offre de services juridiques gratuits ou à coût modique et la réforme de l’IVAC. Pour le ministre Jolin-Barrette, un certain rattrapage s’impose afin d’éviter un alourdissement des délais judiciaires, tout en relevant les défis reliés aux enjeux en matière de main-d’œuvre.
L’honorable David Lametti : partageant ses réflexions à distance, par vidéo, le ministre de la Justice du Canada a notamment exprimé son souhait d’un système de justice encore plus accessible. Au cours de la dernière année, afin de lutter contre la représentation disproportionnée des Autochtones et des personnes racisées, le ministre Lametti a présenté le projet de loi C-5 relativement à l’abrogation des peines minimales obligatoires. Souhaitant un milieu juridique inclusif et diversifié, il veut également soutenir la revitalisation de la tradition juridique autochtone et relancer la Commission du droit du Canada, qui joue un rôle essentiel dans la lutte contre les inégalités.
L’honorable Manon Savard : pour la juge en chef du Québec, la pandémie a révélé les lacunes du système de justice, mais a aussi accéléré les changements. Essentielles au fonctionnement de l’appareil judiciaire, les technologies joueront un rôle prépondérant dans la justice de demain. Même si la Cour deviendra bientôt numérique et que le papier sera chose du passé, le système de justice devra essentiellement demeurer le même. L’intelligence artificielle, qui fait déjà partie intégrante de notre vie, entraînera des conséquences qui dépasseront la disparition du papier et pourrait ainsi permettre de pallier aux problèmes des délais et de pénurie de la main-d’œuvre. La question du financement est toutefois un enjeu crucial en matière de transformation de la justice. Afin préserver la confiance du public dans ses institutions, la juge en chef estime qu’il est nécessaire que la justice ait la part de financement qu’elle mérite.
L’honorable Paul Crampton : le juge en chef de la Cour fédérale vise tout d’abord un équilibre entre les auditions en présentiel et en virtuel. La Cour fédérale a également mis en place cette année un projet pilote établissant trois chambres au sein de la Cour, et ce, en matière de propriété intellectuelle, droit de l’amirauté et de recours collectifs. Quant à la Cour d’appel, celle-ci est réouverte au public et les audiences en personne sont privilégiées. Le juge en chef Crampton rappelle aussi le déploiement du projet pilote permettant d’intenter des procédures en vertu du Code de procédure civile, qui a toutefois suscité peu d’engouement jusqu’à présent.
L’honorable Marie-Anne Paquette : selon la juge en chef de la Cour supérieure, les audiences virtuelles créent un surplus de travail, et ce, tant pour le personnel de la Cour que pour les juges. Même si le milieu juridique est assez réfractaire au changement, la modernisation de la justice est cruellement nécessaire et la livraison d’un véritable dossier judiciaire numérique doit être priorisée. La Cour supérieure a également déployé de vastes efforts d’harmonisation des directives entre les différents districts de la division de Montréal. De nouvelles directives harmonisées entreront donc en vigueur dès l’automne. La Cour travaille également à moderniser sa gouvernance en préparant une planification stratégique. Finalement, la juge en chef Paquette demande à tous de ne pas ménager les efforts pour inspirer et mériter la confiance du public envers son système de justice.
L’honorable Lucie Rondeau : la juge en chef de la Cour du Québec a indiqué s’inquiéter de l’effritement du décorum, surtout lors des auditions à distance. À cet effet, de concert avec la Cour supérieure et la juge en chef des cours municipales, la Cour du Québec a élaboré de nouvelles lignes directrices visant à encadrer l’utilisation des technologies en salle d’audience et la conduite des participants en salle d’audience. De plus, la juge en chef Rondeau est également préoccupée par les attaques contre les tribunaux et les juges qui ne s’inscrivent pas dans le cadre d’une saine critique des institutions judiciaires. Celle-ci réitère également son engagement à défendre un principe fondamental au bénéfice des justiciables : l’indépendance judiciaire institutionnelle des tribunaux.
Cérémonie de la Rentrée judiciaire
Me Marie-Ève Bordeleau : en raison de son absence pour des raisons personnelles, l’allocution de Me Bordeleau, qui occupait jusqu’à tout récemment le poste de commissaire aux relations avec les Peuples autochtones pour la Ville de Montréal, a été lue par Me Claudel Trudeau-Nepton. Par le biais de celle-ci, Me Bordeleau invite les avocats montréalais à bâtir l’avenir avec les peuples autochtones. Pour permettre une véritable réconciliation, il est nécessaire de connaître la vérité, avant de s’engager dans un processus de guérison qui ne doit pas être destiné seulement aux Autochtones. Il faut aussi répondre aux besoins réels de cette partie de la population, que ce soit pour favoriser leur accès à la justice ou pour leur offrir des services culturellement sécuritaires. Pour Me Bordeleau, il est essentiel de reconnaître les torts et les obstacles du système et de travailler ensemble pour l’améliorer.
Me Catherine Claveau : pour la bâtonnière du Québec, la justice occupe une place de plus en plus importante dans les débats publics. Des solutions créatives et pérennes doivent être mises en place afin que celle-ci devienne une priorité comme l’éducation et la santé. En d’autres mots, la justice n’est pas un luxe et doit être considérée comme un véritable service essentiel. Des actions concrètes doivent être prises afin de moderniser le système judiciaire et d’accroître la confiance du public envers celui-ci.
Me Alexandra Paquette : pour la présidente du Jeune Barreau de Montréal (JBM), afin de bâtir l’avenir, il faut mettre ses idées, ses questions, ses espoirs et ses rêves en commun. La diversité et l’inclusion sont une richesse de la profession juridique. Me Paquette invite également les avocats montréalais à repousser les limites et à exiger des réflexions dans l’ensemble des institutions juridiques. La présidente du JBM est également préoccupée par les problèmes de santé mentale chez les jeunes et les invite à en parler, sans avoir peur du jugement des autres.
Le très honorable Richard Wagner : récipiendaire de la Médaille du Barreau de Montréal, le juge en chef de la Cour suprême du Canada a d’entrée de jeu réitéré son soutien et son encouragement inconditionnels au Barreau de Montréal et à sa bâtonnière. Les différentes initiatives qu’il a mises en place au cours des dernières années sont une suite logique de son passage au Barreau de Montréal, notamment à titre de bâtonnier. Pour le juge en chef Wagner, il importe aussi que tous les justiciables se reconnaissent dans la magistrature, car il en va de la confiance du public envers l’administration de la justice. Il demeure essentiel de continuer à contribuer à l’avancement de la cause de la justice, le maintien de la primauté du droit et l’indépendance judiciaire étant essentiels pour sauvegarder la démocratie.
Me Julie Mousseau : ayant choisi d’inscrire son bâtonnat sous le thème Bâtissons l’Avenir, la bâtonnière de Montréal souhaite que le Barreau continue d’assurer la protection du public en fonction des réalités de tous. Pour se faire, le Barreau de Montréal veut recentrer sa mission de protection du public au cœur de toutes ses activités et mieux la communiquer. Il verra également à adopter des positions publiques dans un esprit de protection du public et ainsi défendre les intérêts des justiciables. Un projet qui tient à cœur à Me Mousseau sera l’organisation de Grands entretiens, notamment afin de mettre en lumière certaines femmes. À cet effet, elle a souligné également la place marquante qu’occupent les femmes dans des postes clés de différentes institutions judiciaires. La bâtonnière de Montréal rappelle enfin que tous ont un rôle à jouer afin de bâtir un avenir fort, un avenir où le système de justice est plus accessible et plus compris.
Suivant la cérémonie, les avocats présents ont eu la chance de se retrouver et d’échanger lors de la réception dinatoire. Réservez tout de suite la date à vos agendas, la prochaine Rentrée judiciaire aura lieu le 7 septembre 2023.
Pour ceux qui ont manqué ou qui veulent revoir la cérémonie de la Rentrée judiciaire, vous pouvez la visionner en cliquant ici.