2012-2013
Me Christiane Pelchat
Avocate artisane d’un monde meilleur
Par Julie Latour, avocate, ancienne bâtonnière du Barreau de Montréal
À l’occasion de la Journée du Barreau, le 6 septembre prochain, la Médaille du Barreau de Montréal sera décernée à Me Christiane Pelchat, afin de souligner sa contribution unique à la cause de la justice.
Par son engagement politique, social et humanitaire, Me Pelchat s’est employée à bâtir une société plus juste. Pour elle, la primauté du droit doit servir la cause plus profonde de la justice sociale, et au premier chef la quête d’égalité réelle de la moitié du genre humain : les femmes.
Avant 1942, il s’avérait impensable qu’une femme devienne avocate au Québec. Voilà que, 70 ans plus tard, par un beau retournement des choses, une avocate se démarque en représentant la moitié de la population du Québec !
Me Pelchat a conjugué sa double formation en sciences politiques et en droit pour agir dans la cité. Elle devient, en 1985, l’une des plus jeunes femmes députées de l’Assemblée nationale du Québec, où elle siège jusqu’en 1994. Elle pratique ensuite le droit, notamment au sein du cabinet Fasken Martineau.
Me Pelchat œuvre de 2000 à 2003 au sein d’organismes internationaux, entre autres au Sénégal, au Niger et à Haïti, à titre de chargée de missions axées sur la formation des femmes et leur accès aux lieux de décisions.
Son inlassable engagement pour les droits des femmes culmine avec sa nomination à titre de présidente du Conseil du statut de la femme, fonction qu’elle a occupée de 2006 à 2011, avant d’être nommée déléguée générale du Québec à Mexico, le 15 août 2011.
À titre de présidente du Conseil de la femme, Me Pelchat a fait preuve d’un leadership remarquable dans la défense d’une valeur fondatrice du Québec moderne : l’égalité entre les hommes et les femmes. Elle a démontré les qualités essentielles et le courage de l’avocat, soit de défendre inlassablement une cause, pour favoriser les fins de la justice, malgré les pressions de l’air du temps.
Le féminisme est un humanisme. L’égalité des sexes, c’est le droit de chacune et de chacun de réaliser ce qui est en sa puissance, une source d’évolution pour toute société. Cependant, le néolibéralisme, la montée de la droite et de l’intégrisme religieux constituent parfois le prétexte à la remise en cause des droits des femmes. L’histoire se réécrit et les acquis du passé sont souvent menacés.
Dès son entrée en fonction, Me Pelchat orchestre la production de l’avis « Droit à l’égalité entre les femmes et les hommes et liberté religieuse », qui établit que l’égalité entre les femmes et les hommes ne peut être compromise par des accommodements dits raisonnables.
En réponse à cet avis, le gouvernement du Québec amende la Charte des droits et libertés de la personne, en juin 2008, pour y consacrer le droit à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Un second avis, « Affirmer la laïcité, un pas de plus vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes », publié en 2011, rappelle que c’est par l’avènement d’un corpus de droit séculier, dénué de tout référentiel religieux, que les femmes ont pu aspirer à l’égalité de droit, d’où l’importance de limiter l’intrusion du religieux dans la sphère publique, pour assurer l’intégrité d’un État de droit.
Me Pelchat a également défendu la sécurité économique des femmes, et la pleine participation des immigrantes au développement économique.
Sur le plan personnel, Christiane Pelchat parraine depuis une dizaine d’années de jeunes garçons talibés au Sénégal, réduits à la mendicité. Afin de chapeauter son action humanitaire, elle a créé en 2009 une fondation pour l’aide à l’enfance. À la suite du décès tragique de son époux, Serge Marcil, lors du séisme qui a frappé Haïti en janvier 2010, elle œuvre, par le biais de cette fondation, à la reconstruction d’un orphelinat qui a laissé 40 orphelins sans abri.
Me Christiane Pelchat est dotée d’un élan vital communicatif et d’un sens profond de la solidarité et de la dignité humaine. Par cette Médaille, le Barreau de Montréal veut reconnaître son apport tangible à édifier une société plus juste.